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Projet de vie, plan personnalisé de compensation, proposition d'accompagnement Version imprimable Suggérer par mail

Dans son intervention aux 2° journées interrégionales « Demain� les IME, IEM & IEAP » , Jean-Yves Barreyre remarque que :
- d'une part la loi du 2 janvier 2002 rénovant l'action sociale et médico-sociale et la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, n'emploient pas le terme de projet individuel, individualisé ou personnalisé, pourtant si familier au secteur,
- d'autre part l'une et l'autre ne parlent pas exactement de la même façon de la prestation à offrir à la personne accompagnée ou accueillie.
La loi du 2 janvier 2002 parle :
- dans son article 2 de l'évaluation des « besoins et des attentes » des personnes,
- dans son article 7-2° d'un « accompagnement individualisé »,
- dans son article 7-7° d'un « projet d'accueil et d'accompagnement »
La loi du 11 février 2005 parle :
- des « besoins et des aspirations de la personne »
- de son « son projet de vie ».

Les termes de la loi du 2 janvier 2002 concernent les professionnels tandis que ceux de la loi du 11 février 2005 se situent du côté des personnes en situation de handicap, ce que marque notamment l'utilisation du terme d' « aspiration » à la place de celui d' « attentes ». Une aspiration est en effet l'expression d'un choix de vie déterminant pour la personne qui le formule, alors que l'attente manifeste une demande plus tempérée.

Mais Jean-Yves Barreyre fait aussi l'hypothèse que le terme de « projet de vie » employé en 2005 témoigne d'une évolution qui rendrait impropre celui de projet employé en 2002 à propos de l'action des professionnels. Au regard des différents termes employés dans la loi du 11 février 2005 et de l'articulation des instances de décision et de définition de l'action à mener, il convient en effet de hiérarchiser les notions pour situer les places respectives de la personne avec un handicap, des pouvoirs publics et des professionnels. Au cours de la préparation de la loi, les représentants des personnes handicapées ont protesté contre l'emploi à leur propos de termes issus de la CIF (Classification internationale du fonctionnement), parce qu'il s'agissait à leurs yeux d'un langage technique, susceptible de définir la réponse apportée en matière de compensation, mais pas d'énoncer leurs choix de vie. Reprenant à leur compte la perspective développée par Amartya Sen autour de la notion de « capabilité », ils revendiquaient la possibilité de déterminer leurs choix de vie, la reconnaissance d'un libre arbitre qu'ils s'estiment en droit d'exercer comme tout un chacun, sans que puisse leur être opposées des restrictions, des prudences particulières, l'argument d'un bien-être défini par des institutionnels ou des professionnels, à l'encontre de l'orientation qu'ils souhaitent donner à leur existence. Autrement dit ce qu'on devrait appeler l'indépendance (décider de soi-même), par distinction de l'autonomie (faire par soi-même). Ce positionnement témoigne de la montée en puissance d'une demande de droit, hors du registre de la clinique, sur le versant de la citoyenneté, dont la revendication des personnes en situation de handicap mental d'être reconnues dans les particularités de leurs conduites constitue sans doute l'exemple le plus emblématique.

Conséquence logique, la notion de projet de vie relève de la personne et strictement de la personne : il est constitué des domaines d'activités qui lui permettent de choisir son existence (ex : vivre dans un foyer, dans sa famille ou dans un logement autonome, exercer la sexualité de son choix, élever son enfant, prendre des vacances dans une région éloignée, etc.).

Le rôle de la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) consiste à favoriser l'accès à ces domaines d'activité, à apporter les compensations relatives au handicap qui permettront à la personne de déterminer son existence selon les mêmes droits que tout un chacun. Elle élabore avec la personne le Plan personnalisé de Compensation, détermination des moyens mis en �uvre en faveur de son projet de vie, stratégie d'action concertée au vu de la spécificité de sa situation et dans la mesure des moyens délimités par les textes. Sa composition témoigne de ce rôle d'articulation puisqu'on y trouve des représentants institutionnels (Département, services de l'Etat, organismes de protection sociale) des représentants de la société civile (organisations syndicales, associations de parents d'élèves), des représentants des personnes handicapées et de leur familles, des représentants des organismes gestionnaires d'établissement et de services, autrement dit prestataires de service (avec voix consultative et non délibérative). Représentation des pouvoirs publics et de la société civile, niveau de la citoyenneté, elle oriente la personne vers l'instance professionnelle susceptible de lui offrir une prestation favorisant son projet de vie.

Le troisième niveau donc, le Contrat de séjour ou Document individuel de prise en charge (DIPC) définit la prestation délivrée par un service ou un établissement pour soutenir la réalisation du Plan personnalisé de compensation. Dans la perspective développée, le terme de « projet individuel » , qui actualise le Contrat de séjour ou DIPC, ne convient pas. Il faudrait parler de proposition d'accompagnement individualisé ou personnalisé. Les professionnels d'un établissement ou d'un service développent en effet, non pas un projet, mais un programme d'actions auprès de la personne, avec son accord (ou celui de son représentant légal), en faveur de son projet de vie.

Cette hiérarchisation des instances est d'importance car elle situe la place de chacun, obligeant à l'emploi de termes distincts, au risque sinon d'entretenir des confusions entre les niveaux et donc les places respectives :
- le projet de vie de la personne
- le plan de compensation concerté avec elle
- la proposition d'accompagnement formulée par les professionnels de l'établissement ou du service.
Le projet de vie relève de la citoyenneté et non de la clinique. Les établissements et services sont des organisations médico-sociales, instances prestataires de service dans le cadre du schéma départemental, sollicitées par la CDAPH, instance chargée d'articuler les aspirations de la personne et les moyens définis par la société pour lui permettre d'exercer ses droits au travers de son projet de vie. La notion de projet recouvre une dynamique en même temps qu'une part d'indétermination et donc de liberté, qui doivent appartenir à la personne et non aux professionnels. Ce que ceux-ci proposent, c'est une prestation au service du développement de la personne dans le cas d'un enfant ou de son projet de vie au sens de la façon dont elle souhaite orienter son existence dans le cas d'un adulte. Cette prestation n'a pas le statut d'un projet, mais d'une proposition relevant d'une stratégie de compensation au regard du handicap, proposition qui sera déclinée par les membres de l'équipe pluridisciplinaire au travers d'un programme d'action relevant de sa technicité. L'action professionnelle ne relève donc pas du projet, qui n'appartient qu'à la personne concernée.




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H.L. Kristiansen, Paroles Inuit